Tout a débuté de façon spontanée sur l’avenue Bernard, dans le Mile-End. Alors qu’au-delà de la rue Hutchison – qui marque la frontière avec Outremont -, c’était le calme plat, les premiers kling-klangs se sont fait entendre un peu après 20 h, non loin de l’avenue Jeanne-Mance.

Une petite pause sur la rue Lajoie, en attendant que d'autres manifestants descendent dans la rue, tandis que trois voitures de police bloquent les artères - Gary Lawrence
À leur fenêtre, sur leur balcon, sur le trottoir, les gens ont commencé à apparaître, casserole de métal et trompette de plastique à la main, et le niveau sonore a rapidement augmenté dans la bonne humeur.
Puis, subitement, quelqu’un a lancé: “À nous la rue!”, et un cortège humain s’est formé sur l’avenue Bernard. Dix, vingt, cinquante, bientôt plus de 200 personnes se sont ralliées à la marche, sans itinéraire prévu – comment aurait-il pu y en avoir un?
À mesure que le cortège avançait, des gens sortaient encore et toujours plus sur leur balcon (répondant sans doute docilement à l’invitation de leur concitoyen de quartier et maire bien-aimé).
Bien d’autres Outremontais ont rapidement préféré prendre la rue, comme autant de gouttes d’eau venant gonfler le ruisseau qui se formait à leurs pieds, le ruisseau devenant bientôt rivière humaine, sans jamais se transformer en marée.
Il y avait de tout: des quinquagénaires gaillards, des ados pétulants de fraîcheur, des soixante-huitards retraités ou dans l’âme, des mèches alertes et des tempes grisonnantes, des petiots en pyjama…
D’ailleurs, beaucoup de petites familles étaient présentes, celles-là même qui sont venues s’établir ces dernières années dans ce quartier qui n’est sans doute plus aussi bourgeois qu’il l’a été, et qui voulaient inculquer quelque rudiment de démocratie 101 à leurs rejetons.
Tout ce beau monde a continué à zigzaguer bruyamment, marquant une pause devant la (présumée?) maison du maire, sillonnant le quartier avant d’aller gonfler les rangs d’autres cortèges sonores qui ont déferlé jusqu’au centre-ville, cette fois-ci sans aboutir dans des souricières.
Comme dans bien d’autres quartiers de Montréal ou d’ailleurs, pas de vandales ou d’anarchistes, nulle violence ou rudoiement, ni cri ni invective, bien au contraire: les passants arboraient des sourires réjouis, les badauds filmaient les scènes, des gens en terrasse se levaient pour applaudir, des automobilistes klaxonnaient par solidarité.
Oh! il y a bien eu quelque dommage collatéral, comme des cuillers en bois fracassées, et de braves épicuriens mécontents, comme cet Outremontais aussi outré qu’outrecuidant, bien assis en terrasse sur Bernard, toisant tous les manifestants d’un oeil torve, le majeur dressé vers le ciel. La belle vie!
Mais dans l’ensemble, la soirée d’hier a permis de tâter le pouls de la population, de sonder la vraie nature d’une bonne partie de celle-ci, de faire des rencontres aussi intéressantes qu’inattendues. Comme lorsqu’on part en voyage et qu’on laisse place à l’imprévu.
Serait-ce parce que, contrairement aux circuits organisés où tout est structuré et planifié, l’exploration du quartier s’est faite de façon aléatoire, sans itinéraire connu à l’avance?
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