
Si la tendance se maintient, Stephen Harper se lancera dans une quatrième campagne à titre de premier ministre sortant. Mais même s’il gagne, ses jours pourraient être comptés dès le lendemain du vote. (Photo © Sean Kilpatrick / La Presse Canadienne)
Travailler sur une colline du Parlement, c’est comme vivre dans une ruche. À Ottawa, cet automne, la rentrée fédérale a été précédée par le bourdonnement qui augure habituellement un grand événement.
Quelques heures avant la reprise des travaux à la Chambre des communes, le cabinet du premier ministre a annoncé que Stephen Harper prononcerait un discours devant des partisans dans une salle située à quelques coins de rue du parlement.
Le moulin à rumeurs s’est mis à tourner à la vitesse grand V. L’idée que Stephen Harper allait peut-être annoncer son départ de la politique s’est répandue d’un bout à l’autre de la Colline comme une traînée de poudre.
Partira, partira pas ? Impossible, ce matin-là, dans la capitale fédérale, d’échapper aux suppositions quant aux intentions du premier ministre.
À la place d’une démission, les députés du gouvernement et leurs attachés politiques ont finalement eu droit à un avant-goût du discours électoral que leur chef entend marteler d’ici le scrutin de 2015.
À moins qu’il ne veuille jouer un mauvais tour à son parti, tout indique que Stephen Harper sera de nouveau sur les rangs l’an prochain.
Pierre Trudeau et Brian Mulroney avaient tous les deux démissionné sur le tard, alors que leurs gouvernements respectifs avaient déjà entamé la dernière année d’un mandat de cinq ans. Mais le passage, en catastrophe, du flambeau à un successeur a rapidement été suivi, dans les deux cas, d’une cinglante défaite électorale.
S’il avait voulu partir dans des circonstances optimales pour les conservateurs, c’est le mois dernier qu’il aurait fallu que Stephen Harper annonce qu’il raccrochait ses patins. Désormais, chaque mois qui passe rend la transition vers un nouveau chef plus problématique.
Si la tendance se maintient, le premier ministre actuel se prépare donc à jouer son va-tout en prenant le risque d’une cinquième campagne comme chef conservateur et d’une quatrième comme premier ministre sortant.
Or, les quatrièmes mandats consécutifs sont chose rare en politique fédérale. Des provinces comme l’Ontario et la Colombie-Britannique ont récemment choisi de laisser les rênes du gouvernement entre les mains de partis qui avaient déjà trois mandats à leur actif. Mais dans les deux cas, l’arrivée de nouveaux chefs à la tête du parti formant le gouvernement a eu un effet déterminant sur l’électorat.
D’autre part, depuis qu’il est devenu chef du Parti conservateur, il y a 12 ans, Stephen Harper a amélioré le score de son parti à chaque élection. Mais depuis plus d’un an, au moins le quart de ceux qui ont voté Harper en 2011 disent aux sondeurs qu’ils n’ont pas l’intention de répéter l’expérience.
Parmi les électeurs qui avaient permis d’apporter la victoire aux conservateurs la dernière fois, il y avait une foule de sympathisants libéraux, déprimés par la campagne de Michael Ignatieff et surtout effarouchés par l’idée que la vague orange québécoise puisse déborder sur le reste du Canada et porter le NPD au pouvoir.
Ces électeurs sont rentrés au bercail depuis l’arrivée de Justin Trudeau comme chef. Et ils ont nettement moins peur du NPD après l’avoir vu jouer le rôle d’opposition officielle avec discipline et, surtout, modération.
D’ici le scrutin, les aspirants présumés à la succession de Stephen Harper vont se faire discrets, mais cela ne veut pas dire qu’ils vont se mettre « au neutre ».
Personne ne croit que Stephen Harper resterait à la barre d’un Parti conservateur recalé dans l’opposition l’an prochain. Rares également sont ceux qui pensent que le premier ministre serait partant pour un autre mandat minoritaire. Et presque tous les conservateurs sont convaincus que, même dans l’éventualité d’une victoire, la prochaine campagne sera la dernière du chef conservateur.
Si M. Harper remportait son pari de faire élire un autre gouvernement majoritaire, les plus ambitieux de ses députés commenceraient la veillée funèbre de son leadership dès le lendemain du vote.
Et si la tendance observée dans les sondages se maintient au cours de la prochaine campagne, la course à sa succession pourrait battre son plein avant la fin de l’an prochain.
Le scrutin de 2015, dont on prévoit qu’il sera mouvementé, pourrait bien mettre la table pour une période de grandes turbulences au fédéral.
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