Ce mardi arrive en magasin le tout nouveau disque de Paul McCartney, New.
Cet album est un retour aux chansons originales pour l’ex-Wings après un très inutile détour par les reprises jazz de type «crooner de fin de semaine» de son disque Kisses on the Bottom.
Le premier extrait de New, sorti il y a quelques semaines et que vous pouvez écouter ci-dessus, laissait présager le meilleur.
Mais à l’écoute de ce morceau très très McCartney-esque, on était en droit de se demander : sera-t-il si nouveau, ce New ? Hé bien oui. Juste assez.
On sent l’ex-Quarrymen tenter d’être le plus possible de son temps dans l’habillage de ses chansons. Il y a donc une petite touche électro par-ci par-là et le mixage est très actuel (c’est-à-dire, trop souvent, un brin trop compressé).
N’arrivant pas à choisir un seul réalisateur, Sir Paul a plutôt jeté son dévolu sur quatre d’entre eux. Force est d’admettre, malheureusement, que ça se sent. L’album manque d’unité dans les textures, les sons et les intentions.
Si vous êtes un fan de l’ancien mari de Linda McCartney ou avez déjà été un fan, allez jeter une oreille à New. Dans les montagnes russes que sont ses albums depuis la fin des Beatles, celui-ci est plus près du sommet que du creux en fait de qualité.
Maintenant, parce qu’il faut bien se vider le cœur une fois de temps à autre, laissez-moi profiter de l’occasion pour vous parler de ma relation avec Paul McCartney.
Avertissement : Si vous êtes un super méga fan de Paul McCartney,
vous allez grincer des dents si vous lisez plus loin que ce point.
Vous voilà avertis.
Paul et moi : ou quand un blogueur incapable d’écrire une chanson se permet de dire du mal du plus grand artiste pop du XXe siècle
J’entretiens une relation amour-haine avec Paul McCartney. Même que je ne comprends pas ceux qui arrivent à l’aimer sans compromis. Je ne vois pas, en fait, comment on peut aimer Paul McCartney en entier. Même à l’époque des Beatles.
Parce que Paul des Beatles, c’était celui capable de présenter avec autant d’entrain un morceau de génie pur comme «For no one»…
… et, trois années plus tard, un rebut complet comme «Maxwell’s Silver Hammer».
(Bien sûr, il se trouve des gens pour la trouver très bonne, Maxwell. Évidemment. C’est un choix relativement personnel de ma part, qui sert à une démonstration elle aussi relativement personnelle.)
Croyez-le ou non, c’est l’une des chansons qui a pris le plus de temps aux Beatles à enregistrer. On accuse souvent Yoko Ono d’être responsable de la fin des Beatles, mais soyons sérieux : seriez-vous resté longtemps dans un groupe qui passe des journées complètes à travailler (et donc à entendre à répétition) cette chanson ?
Mais que voulez-vous, Paul la trouvait vraiment bonne, sa chanson. Il voulait en faire un «single». Ce qui n’arriva jamais.
Paul n’a pas de jugement. Je le juge pour ça.
C’est, au fond, le nœud de mon problème avec Sir Paul : l’artiste a un talent incroyable… mais bien peu de goût. Ou de jugement.
Quand McCartney écrit 30 chansons, il enregistre les 30 chansons. Il semble avoir bien peu de flair quant à ce qui fait une bonne chanson ou pas. Le malheur, son malheur, c’est qu’en tant qu’ex-Beatles, intouchable, immortel, gars-à-qui-on-ne-dit-pas-non, personne ne semble être là pour le lui dire.
Il est chanceux, le McCartney. Avec son talent naturel impossible, il a une très bonne «moyenne au bâton». Sur les trentes chansons, un bon nombre sont d’assez bonne qualité. C’est peut-être la raison pour laquelle il n’a jamais eu à apprendre à vraiment faire un tri.
Paul a récemment avoué en entrevue qu’il avait complètement oublié certaines des pièces qui se trouvent sur ses albums solos. Il écoute un disque, son propre disque, et découvre des chansons. C’est vous dire à quel point le tri de départ était faible.
Mais bon, pourrait-on lui en vouloir d’avoir oublié, disons, «Où est le soleil» ?
Je rêve d’un monde où le bassiste végétarien aurait sorti deux fois moins d’albums, laissant à chaque fois de côté les pièces médiocres, pour n’enregistrer que ses moments de génie.
Paul McCartney est au sommet de son art quand il a autour de lui des gens pour diriger son flux créatif. Dans les Beatles unis du début, une mauvaise chanson était généralement écartée (sauf pour faire plaisir à Ringo). Dans les Beatles divisés de la fin, on pouvait passer trois jours sur «Maxwell’s Silver Hammer».
Le dernier bon moment discographique de Macca remonte à l’album Chaos and Creation in the Backyard, en 2005. Il travaillait alors avec le réalisateur Nigel Godrich, qui s’est permis de le bousculer un peu et de dire non à certaines chansons. Ça paraît.
Ça donne droit à de beaux moments comme «Too Much rain» :
Non Paul, ce n’était pas toujours mieux dans le bon vieux temps
Paul McCartney, c’est aussi un éternel nostalgique, au point où il est insupportable en entrevue. Quand on lui pose une question, même sans mentionner les Beatles, il y a une chance sur deux pour que ça nous ramène aux Fab Four. Tout le temps.
Ce n’est pas nouveau : déjà du temps des Beatles, Paul était nostalgique des Beatles. Je me souviens avoir lu une entrevue faite entre les disques Revolver et Sgt. Pepper’s. Il racontait qu’il aimerait que les Beatles reviennent à leurs sources, à ce qu’ils faisaient sur la scène de The Cavern, qu’il s’ennuyait de leurs belles années à Berlin. Pfff…

Moi, lisant une entrevue avec Paul McCartney
Sur son nouveau disque, New, il y a même une chanson au sujet des Beatles : «Early Days».
Il n’est pourtant pas resté coincé aux années Beatles dans sa musique. Il n’est pas musicalement pris dans une époque passée, comme plusieurs de ceux qui ont tenté de traverser les décennies. Il a toujours écrit de nouvelles chansons et sorti de nouveaux albums, relativement en phase avec le son de l’époque.
Entendrez-vous ces nouvelles chansons si vous allez le voir en spectacle ? Ho que non ! En spectacle, Paul McCartney offre un paresseux «best of» des chansons qu’on dit incontournables, et rien d’autre.
Paul, tu es un artiste ! Respecte-toi !
Ho, oui oui, je sais, vous allez me dire qu’il joue ce que le public veut entendre. Lui-même dira qu’il fait le juke-box par respect pour les gens venus l’écouter. Or, je ne dis pas de ne jamais jouer «Hey Jude». Je dis que s’il ne joue QUE «Hey Jude», c’est à lui qu’il manque de respect. En spectacle, Paul McCartney renonce carrément à son art, il refuse d’avancer. Il n’est que nostalgie.
Il y a pire encore que de jouer «Yesterday» sur scène : il y a jouer «Yesterday» accompagné par UN SYNTHÉTISEUR ! Pas de vraie section de cordes en tournée pour Paul. Pas de vrais cuivres non plus. Le solo de trompette de «Penny Lane», il est donc joué avec un son de karaoké cheap :
Ce serait trop coûteux de traîner cordes et cuivres ? Allons donc ! Les Cowboys Fringants ont déjà fait une tournée avec une section de cuivres !
Pour moi, rien ne dit «manque de goût» et «je suis là pour l’argent» plus que cette utilisation de synthétiseurs. Ça me dit aussi à quel point Paul McCartney n’est pas conscient de ce qu’il a entre les mains et entre les oreilles.
Paul, tu gaspilles (ton talent)
Il arrive donc que je déteste sincèrement Paul McCartney. Je le déteste de gaspiller ainsi un talent qui semble venu directement des dieux.
Voilà. Mon problème avec Paul McCartney, c’est qu’à chaque fois qu’il décide de passer du temps et de l’énergie sur une chanson faible, c’est une chanson géniale qui ne voit peut-être pas le jour.
Comme si Mozart avait perdu son temps à écrire «Elle est morte la vache à Maillotte», plutôt que d’écrire son Requiem.
8 moments de génie trop peu connus de Paul McCartney
Pour célébrer son génie, et pour vous montrer que je ne suis pas que haine et mauvaise foi, laissez-moi vous offrir une petite sélection musicale regroupant huit moments fabuleux de la carrière de Paul McCartney. Des moments trop peu souvent célébrés, trop peu connus.
Cliquez sur le bouton «Play» dans le carré ci-dessous pour les entendre.
«Dear Boy», pièce tirée du beaucoup trop méconnu album Ram, de loin, le meilleur album solo de Paul McCartney.
«Goodbye», une chanson que McCartney a offerte à la chanteuse Mary Hopkin. La version d’Hopkin est complètement gâchée par une surréalisation, mais le démo de Paul est parfait.
«Coming up», interprété par Alexis Taylor, chanteur de Hot Chip, sur son album Rubbed Out. Ici, c’est le contraire : la version de Paul McCartney est insupportable, alors que la reprise de Taylor est formidable.
«Junk», une chanson de l’époque des Beatles que McCartney n’a véritablement endisquée que quelques années plus tard. Le démo proposé sur le volume 3 de l’Anthology est simplement magnifique.
«Come and get it», par Badfinger. Chanson écrite et réalisée par McCartney, pour un groupe signé sur Apple, l’étiquette des Beatles.
«Here Today», de l’album Tug of War, album autrement assez faible. Une chanson écrite en l’honneur de John Lennon, comme quoi la nostalgie de Paul peut parfois donner de grands moments. Émouvant au possible.
«Penny Lane», par Les Sinners. Non, ce n’est pas vraiment une bonne reprise, pas plus que les 1000 reprises du genre qui ont plu sur le Québec à l’époque. Mais même la pire des reprises des Beatles reste agréable, ce qui en dit long sur la valeur des chansons du tandem Lennon-McCartney. Des chansons que même Michèle Richard n’arrivait pas à briser.
«Too much rain», de l’album Chaos and Creation in the Backyard. J’en ai parlé dans le billet et, depuis, je ne peux plus m’empêcher de l’écouter.
«Let me roll it», de l’album Band on the run. Parce que Paul sait aussi rocker intelligemment.
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Et vous? Me trouvez-vous trop dur avec le grand Paul? Quel serait votre chanson préférée de Paul McCartney?

Paul McCartney, réagissant à ce billet de blogue.
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