
Photo : Lefteris Pitarakis / AP / PC
BlackBerry a été vendue à un consortium dirigé par son plus gros actionnaire, Fairfax Financial, pour 4,7 milliards de dollars. Le fait que la firme soit vendue à une société financière plutôt qu’à un concurrent – et pour seulement 9 dollars l’action – montre à quel point la situation de l’entreprise est précaire et ne cesse de se détériorer.
On aurait pu croire il y a 18 mois que BlackBerry trouverait preneur et pourrait se vendre à bon prix. Google n’avait-il pas payé 12,5 milliards pour la division mobile de Motorola et tous ses brevets ? Mais JP Morgan et RBC, à qui on a demandé de trouver un acheteur, sont revenus bredouilles.
Pendant ce temps, Fairfax Financial, une holding fondée en 1985 par Prem Watsa, se met à acheter des actions. Elle détient 2,5% des titres en 2011, 5,12% en janvier 2012 et elle devient le principal actionnaire plus tard dans l’année avec 10 % des actions. Prem Watsa accède au conseil d’administration en janvier 2012. À ceux qui lui demande ce qu’il fait dans cette galère, il répète cette maxime de John Templeton, l’un des investisseurs les plus réputés de l’histoire, «il faut acheter au point de pessimisme maximum».
L’histoire de Prem Watsa est de celles qu’on raconte dans les annales du capitalisme. Cet ingénieur chimique est né à Hyderabad, en Inde, en 1950. Fort de son diplôme, il immigre avec sa femme et ses trois enfants, à London, en Ontario, où réside déjà son frère. Il n’avait que 8 dollars en poche. Il s’inscrit néanmoins à l’université Western où il obtient son MBA. Pour financer ses études, il vend des appareils d’air conditionné et des fournaises.
Il serait aujourd’hui le cinquième homme d’affaires le plus influent au Canada, selon le magazine Canadian Business, et il est milliardaire. C’est Fairfax qui a financé l’achat des magasins de meubles The Brick par son concurrent Leon et on retrouve dans son portefeuille une partie des restaurants East Side Mario et Casey’s, nombreux dans la région montréalaise.
Pourquoi Fairfax achète-elle toutes les actions de BlackBerry ? Prem Watsa a acheté à un prix moyen de 17 dollars sa participation de 10% dans l’entreprise. Sans acquéreur, l’entreprise aurait été condamnée et il aurait pu perdre sa mise.
La descente aux enfers de BlackBerry est impitoyable. Le chiffre d’affaires a diminué de moitié depuis un an, les pertes trimestrielles s’approchent du milliard de dollars, tout comme la valeur des stocks d’invendus. Dans le dernier trimestre seulement, BlackBerry a brûlé 500 millions de dollars de cash – une véritable hémorragie qui aurait saigné sa trésorerie d’ici un an. Il fallait agir fortement et rapidement.
D’ici mai, BlackBerry compte donc réduire de 50% ses dépenses de fonctionnement. 4 500 personnes seront licenciées, en plus des 5 000 postes coupés l’an dernier. L’entreprise se recentre sur le marché des entreprises en mettant en valeur ses logiciels et services. Elle diminue aussi de six à quatre le nombre d’appareils sur le marché.
Et après ? De deux choses l’une : soit l’entreprise continue de s’écrouler et ce sera la fin, soit le nouveau modèle d’affaires permet à l’entreprise de se stabiliser et de retourner éventuellement à la rentabilité. Auquel cas, elle pourrait redevenir une proie attrayante pour un acheteur éventuel.
Voilà le pari de Prem Watsa. Un pari audacieux qui laisse peu de marges de manœuvres. Mais ne faut-il pas acheter «au point de pessimisme maximum» ?
Cet article BlackBerry et le point de pessimisme maximum est apparu en premier sur L'actualité.
Consultez la source sur Lactualite.com: BlackBerry et le point de pessimisme maximum