
La première ministre Birgitte Nyborg, interprétée par l’actrice Sidse Babett Knudsen. L’évolution de cette femme de pouvoir donne au spectateur l’impression de toucher à la vraie vie. (Photo : Mike Kollöffel / DR1)
Les parallèles avec le Québec sont troublants. Une femme première ministre… Un gouvernement minoritaire… Des Inuits revendicateurs… Des soldats embourbés en Afghanistan… La série télévisée Borgen, une femme au pouvoir ne raconte pas, toutefois, la Vieille Capitale, mais une capitale bien plus vieille encore : Copenhague.
Depuis Hamlet, inspiré d’un récit danois du XIIe siècle, on sait qu’il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark. Mais ce Borgen (Parlement) loge moins à l’enseigne de Shakespeare que de Machiavel, dont une phrase est citée en épigraphe au début du premier épisode : « Le prince doit n’avoir d’autre pensée ni d’autre art que celui de la guerre. » La guerre, l’autre nom de la politique.
Et il n’est question que de ça ! La première ministre pense avoir été élue pour gérer un pays ; elle ne gère que des crises. Avec l’opposition, son personnel, sa famille. Avec les médias, les grandes entreprises et les États-Unis. D’une crise à l’autre, d’un épisode à l’autre, ses beaux principes s’écroulent. Des compromis se nouent, des amitiés se dénouent. Et les journalistes couchent à gauche et à droite (y compris au sens politique).
Il sera aussi beaucoup question de télévision, celle qui, dans la course aux cotes d’écoute — concours de beauté qui ne dit pas son nom —, est plus vilaine qu’il n’y paraît. Elle ne viole jamais ouvertement les principes de déontologie. Non (il faut sauver les apparences !), elle se contente de les mettre à sa sauce.

Birgitte avec sa famille (Photo : Mike Kollöffel / DR1)
Si la série a remporté autant de succès, y compris à l’étranger, c’est parce qu’elle montre que les rouages de nos imparfaites démocraties sont partout les mêmes, bien sûr. Mais c’est surtout parce qu’elle jette un regard compatissant sur nos imparfaits politiciens. Pas étonnant que les membres du Club des ex, à RDI, apprécient cette série, ainsi que Jean-François Lisée et Pauline Marois, qui ont même pris la peine d’écrire à ARTV pour dire combien ils avaient aimé la première saison.
Cette série montre que les hommes politiques paient le prix fort pour leur engagement, aussi opportuniste fût-il, et les femmes politiques encore plus. En reniant leurs principes, ils ne font pas que renier leurs promesses ; ils se renient eux-mêmes. Leur entourage n’y échappe pas : les couples se disloquent, les enfants aussi. Plus ces mordus de la politique gravissent les échelons, déjouant cabales et complots, plus ils sont seuls. Et comme personne ne monte plus haut que la première ministre, Birgitte Nyborg, personne n’est aussi seul qu’elle.

Birgitte avec son conseiller (Photo : Mike Kollöffel / DR1)
Rien ne prédisposait l’actrice Sidse Babett Knudsen, qui a fait ses premières armes à Paris (où elle a appris le français), à jouer ce rôle. Au Danemark, elle était connue pour ses rôles comiques : pour le public danois, la voir tra-vestie en chef de gouvernement était terriblement cocasse. Au moins autant que de voir Dominique Michel camper une universitaire dans Le déclin de l’Empire américain.
Cette première ministre oscille entre cynisme et idéalisme. À la tête d’un parti centriste, elle se veut pragmatique. À première vue, elle a toutes les qualités, cette brune beauté : en bonne mère de famille, elle cherche d’abord à protéger ses enfants. Mais elle est peut-être plus calculatrice qu’on ne pourrait le croire. Il lui arrive d’écourter un rendez-vous professionnel pour retrouver sa marmaille. « Il faut tenir les promesses faites à ses enfants, explique-t-elle, parce que, plus tard, ils deviendront électeurs. » C’est une blague, se dit-on. Mais quiconque verra la deuxième saison des Borgia, pardon, de Borgen, se demandera si ce l’est vraiment.
Borgen, une femme au pouvoir. Diffusion de la deuxième saison à partir du 12 août. Rediffusion de la première saison à compter du 3 juin.
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