Ainsi donc, il fallait remplacer le président d’Investissement Québec, Jacques Daoust, jugé trop «banquier» par la ministre Élaine Zakaïb, par quelqu’un davantage axé sur le «développement économique.»
Voilà un étrange et terrible aveu.
Si on entend qu’il y a une incompatibilité entre le métier de base de M. Daoust et le développement économique, il faudrait m’expliquer pourquoi tous les projets d’affaires au monde ont besoin de crédits bancaires. Il n’y aurait pas d’entreprises sans banques. Oui, les banquiers sont souvent frileux, mais leur accès aux capitaux et leur survie dépend de leur rentabilité.
En revanche, ils savent lire le bilan d’une entreprise et ils doivent trouver et aider les bons projets et les bons entrepreneurs s’ils veulent faire de bonnes affaires. Dire qu’une société d’État à vocation économique n’a surtout pas besoin d’un banquier à sa tête est stupide.
La ministre voulait peut-être dire que l’approche rigoureuse et méthodique des banques n’est pas appropriée quand on veut attirer des gros projets et prendre de plus grands risques. Mieux vaut
alors un fonctionnaire qui veut faire avancer les choses, n’importe quelle chose, qu’un banquier prudent par nature et qui fait de la rentabilité son premier critère d’intervention.
De fait, il y a une nette distinction entre les réflexes des investisseurs, plus enclins à prendre des risques, et ceux des banquiers qui veulent protéger leur bilan.
La grande question est de savoir quel type de risque peut prendre une société d’État qui gère l’argent des autres, en l’occurence le nôtre.
Le Parti Québécois a toujours privilégié un certain activisme dans la gestion des sociétés d’État à vocation économique. C’est le modèle Claude Blanchet, président de la Société générale de financement de 1997 à 2002, et mari de Pauline Marois.
Pour Claude Blanchet, les choses étaient simples. La SGF pouvait emprunter aux conditions
de l’État et investir cet argent «pour des rendements de 15%, de 20 % ou de 25%, selon les secteurs», pour citer M.Blanchet. Non seulement cela ne coûte rien, mais il fait faire des profits au gouvernement».
Évidemment, cela ne s’est pas produit ainsi. La SGF modèle Blanchet a soutenu plusieurs projets qui se sont avérés des éléphants blancs et son rendement a été quasiment nul. On se rappellera les millions perdus dans Magnola, Gaspésia ou Métaforia ou tout le pétage de broue en 2000 autour d’un projet de 3 milliards de dollars pour une usine de micro-processeurs qui aurait nécessité des investissements publics de centaines de millions de dollars. La compagnie taïwanaise qui aurait encaissé tout cet argent n’existe même plus.
L’idée de cette SGF péquisto-propulsée était d’attirer des investissements, beaucoup d’investissements. Leur rentabilité passait au second plan. Il fallait investir le plus d’argent possible et la bonification des cadres supérieurs était établie en fonction de cet objectif.
En 2004, la Vérificatrice-générale du Québec avait fortement critiqué cette orientation. Voici ce qu’en disait l’éditorialiste du Devoir, Jean-Robert Sansfaçon:
«Au chapitre de la rémunération de ses cadres, la vérificatrice reproche à la SGF d’avoir mis en application une politique qui insistait trop sur l’objectif d’investir le plus d’argent possible et pas assez sur leur rentabilité. La SGF a versé des primes atteignant 50 % de la rémunération de base à ses 14 cadres supérieurs, malgré le fait qu’elle enregistrait des déficits et que certains projets
récompensés ne voyaient jamais le jour. Cela expliquerait-il qu’on ait tant dépensé pour des projets gigantesques mais peu crédibles, tel Mosel Vitelic (trois milliards)? Cela expliquerait-il aussi
l’insistance des hauts dirigeants à obtenir de plus en plus de fonds du gouvernement pour l’avenir?
Le congédiement d’un «banquier», six mois avant la fin de son contrat, et son remplacement par quelqu’un du sérail marque-t-il le retour à l’hyperactivité subventionnaire et à la recherche à tout prix du gros projet spectaculaire ?
À moins que ce ne soit tout bêtement le remplacement d’un libéral issu du secteur privé par un péquiste du secteur public ? Cette dernière hypothèse serait presque décevante de la part d’un gouvernement qui a promis de faire les choses différemment.
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