La fuite d’une certaine société de consommation
Un certain nombre de voyageurs, surtout ceux qui aiment le voyage au long cours, cherchent parfois à s’évader de notre société de consommation. Sur les routes du monde, il arrive de croiser souvent des individus qui ont pris un peu de distance par rapport à cela et qui sont un peu moins dans le conformisme. Ce qui est une bonne chose assurément, là n’est pas le débat.
Celui qui voyage en routard sur le long terme s’éloigne forcément de notre modèle de société. Personnellement, mes premiers voyages au long cours m’ont appris que oui, on peut se passer de beaucoup de choses. Il est possible de passer des mois avec juste le minimum sur son dos. J’étais déjà assez proche de cela avant, mais le fait de voyager n’a fait que renforcer cette tendance.
Or, la plupart des sociétés dans lesquels ces voyageurs vont et aiment voyager sont à l’opposé. La population recherche, voire rêve, de la société qu’ils préfèrent fuir. Voilà une contradiction assez comique non ?
Réalités de l’autre monde
C’est ce que j’ai noté depuis que je voyage. Je me rappelle notamment les villes de Malaisie et ce nombre élevé de centre commerciaux. Les habitants s’y pressent pour acheter ou du moins pour regarder.
Celui qui réussit à avoir un peu d’argent va tout de suite le montrer par des objets matériels, en premier lieu une voiture. On se compare à son voisin, l’apparence prime. Certains s’endettent pour s’acheter le dernier Iphone ou un 4×4 neuf. Je me rappelle au Chili de l’histoire que m’a raconté mon hôte en couchsurfing. Un ami à lui venait de s’acheter un 4×4 flambant neuf…car tout le monde dans le quartier en avait un.
Si vous prenez le temps de discuter avec un Asiatique ou un Sud-Américain, vous vous apercevrez que 90% du temps (si ce n’est pas plus), ils nous envient notre mode de vie. Ils rêvent de faire comme nous : avoir la possibilité, au-delà de survivre, de vivre et de consommer.
C’est difficile de généraliser selon les cultures et la frange de la population, il y a certes toujours des exceptions. Mais grosso modo, c’est là une réalité.
Il arrive parfois que certains voyageurs reviennent de l’autre bout du monde avec l’idée que « oui, ils sont pauvres, mais franchement, ils sont plus heureux que nous, ils n’ont besoin de rien ». Je caricature un peu, mais vous voyez l’idée. En fait, c’est un peu plus compliqué que cela.
Certes, beaucoup de peuples plus « pauvres » sont plus optimistes et heureux que les Français, éternels pessimistes et insatisfaits selon différentes études. Pour autant, penser que tout est rose, qu’ils ne voudraient pas échanger leur situation contre la nôtre serait inexact. Le voyageur voit rarement la réalité des choses, il ne fait en général que l’effleurer. Il est difficile de réaliser le fait que beaucoup de ces populations vivent dans la précarité économique, que l’Etat social est inexistant, que l’éducation et la santé sont inaccessibles pour beaucoup.
Vagabond
En Colombie, pays que je connais assez bien, je n’ai pas encore rencontré de Colombiens dont la philosophie s’approche de la mienne. Il y a juste une exception, un réalisateur de documentaires que je connais. Les profils artistiques sont souvent plus en marge du modèle dominant.
Honnêtement, pour les Colombiens, je suis un peu comme un vagabond. Je n’ai pas de voiture, pas d’appart, peu de biens matériels. Et quelque part, c’est vrai, je suis un vagabond dans le sens premier du terme. Le terme vagabond a un côté péjoratif pour la grande majorité des gens, il faut bien le dire. Or, il a pour moi plutôt une connotation poétique. D’ailleurs, d’un point de vue étymologique, un vagabond est celui qui change souvent.
Je préfère le mot nomade, plus sexy non ? C’est bêtement une histoire de mots, mais digital vagabond ou techno vagabond, cela le fait moins.
Bref, où en étais-je ?
Oui, je disais donc que pour les Colombiens, je suis un peu un OVNI. Déjà qu’en France, ce n’est pas gagné….Au final, il n’y a pas forcément une grande différence entre ces deux pays. En France, une grande majorité de la population a une approche « classique » de la vie : travailler toute sa vie pour un patron ou dans un domaine que l’on n’aime pas vraiment, attendre pour enfin réaliser, peut-être ses rêves, à la retraite.
Quand je réponds que je suis blogueur voyage, ils ne comprennent pas. Du coup, à moins que je sois très en forme, je réponds plutôt journaliste voyage ou éditeur de site voyage, cela passe mieux. J’avoue que quand j’ai la pêche et que je suis d’humeur taquine, je réponds « voyageur professionnel ». Il y a toujours un ange qui passe alors.
Bon, tout cela, vous pouvez le retrouver en France. Mais ici, c’est bien plus fort. La Colombie est une société bien plus traditionnelle et conformiste. Les gens ne comprennent pas que l’on ne veuille pas gagner plus, avoir une belle voiture, une maison, un chien et, spécificité, une ferme pour y passer son week-end.
Ici, c’est mariage à 25 ans afin de pouvoir vivre ensemble (avant non, d’où le succès des love hôtels à l’heure connus de tous…), puis chercher le boulot le mieux payé, les enfants, le chien, le 4×4, parfois madame ne travaille plus et reste à la maison aidée par la femme de ménage. Les week-ends, on les passe au centre commercial ou à la finca pour les plus riches. Les vacances, tout le monde se presse sur la côté caraïbe dans des hôtels 5 étoiles ou sur les îles San Andres.
Pour les vacances, cela se comprend vu les 2 semaines de congés payés. Pour la recherche de l’argent, cela se comprend aussi vu le pays. Encore que, et c’est là ou le facteur culturel est important, même les plus riches et ceux qui ont vraiment de l’argent ne changent pas d’optique.
Pourquoi ? Peu de Colombiens ont vu autre chose, ils n’ont pas de comparaison. Peu ont voyagé, même en dehors de leur région. Quand au mot passion et travail, ils ne comprennent pas en général. Ceux qui ont vécu à l’étranger (et qui viennent de familles aisées en général) ont déjà une approche différente.
Alors, que pensez-vous de tout cela ? Sommes-nous face à un problème de communication, à un malentendu ? Peut-être, du moins pour ceux qui n’en ont pas conscience.
Pour ma part, j’accepte cette contradiction, même si c’est un peu curieux de la vivre.
Peut-être que ma vision des choses n’appartient qu’à moi. Avez-vous eu déjà cette réflexion ?
Recherches qui ont permis de trouver cet article:
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