Le nom du célèbre chef du cartel de Medellín est malheureusement attaché pour toujours à la Colombie. Pour le pire et le pire. Un tour propose de revenir sur l’histoire du personnage et sur une des périodes les plus terribles du pays. Récit.
Morbide ? Intéressant ?
Escobar, le nom d’un homme qui n’a pas hésité à faire sauter un avion de ligne pour tuer juste un homme. Celui-ci n’avait même pas pris le vol en fin de compte. Bilan : une centaine de morts.
Rien de faisait reculer Pablo Escobar. Ce fut sans doute l’un des plus grands assassins du siècle dernier. Il a échappé longtemps aux forces de l’ordre, à ses ennemis dans le commerce de la drogue, aux paramilitaires et à la CIA.
Lors de mon retour du Chili, je suis passé à Medellín voir Sam de Mosalingua. J’en ai profité pour voir ce que donnait ce fameux tour que certaines agences proposent.
Dix à bord d’un van, nous voilà sillonnant les rues de Medellín en écoutant notre guide nous raconter un personnage, un monstre, une époque.
Un tourisme de la misère ou morbide ? Non, je ne pense pas. Ce que vous allez surtout voir, ce ne sont que des bâtiments qui appartenaient à l’assassin, en gros. Surtout, vous allez apprendre un pan important de l’histoire contemporaine du pays. Et par là même, une partie de la psychologie de ses habitants.
Un sujet tabou qui ne devrait pas être oublié
Car, vous le verrez si vous voyagez en Colombie, les Colombiens n’aiment pas parler de cette époque, ni des FARC, ni de la drogue, ni des idées de gauche d’ailleurs. Ce sont des sujets assez tabous, du moins envers les étrangers.
Notre guide nous disait que cette époque n’était pas abordée en classe. Si cela est exact, c’est une erreur je pense. Les peuples, du moins les politiques, veulent toujours passer sous silence les horreurs du passé. Or, c’est vraiment une mauvaise approche qui peut faire des dégâts.
A l’échelle individuelle, sans vouloir faire de la psychologie de comptoir, vous savez sans doute que les secrets de famille pèsent sur le présent des vivants, sans qu’ils s’en rendent compte souvent. Les non-dits, c’est négatif. Une branche de la psychologie, s’intéresse particulièrement à l’histoire familiale et à ses conséquences. Un sujet que je trouve passionnant. Si vous voulez en savoir plus sur ce sujet, je vous invite à lire ce livre :
De là à penser que les mêmes conséquences sont possibles au sein d’un pays et d’une conscience nationale, il y a un pas qui peut être franchi. Au Cambodge, le génocide des Khmers Rouges fut longtemps occulté dans les manuels. Or, une ONG avait révélé qu’une grosse partie de la population souffrait de dépressions et de névroses diverses. Un hasard, vous pensez ?
La connaissance du passé permet de mieux vivre le présent et l’avenir.
L’Etat Escobar
Pablo Escobar, c’est l’un des côtés sombres de la Colombie. Escobar, c’est le souvenir d’une époque parmi les plus violentes de l’histoire du pays. De 1988 jusqu’à sa mort en 1994, la violence s’abattait sur les grandes villes du pays, et notamment à Medellín.
A un moment, plus de 50 habitants mouraient de mort violente tous les jours. En 1992, plus de 27 000 habitants moururent de mort violente.
Notre guide se rappelle bien cette époque, elle qui était alors à peine une adolescente. Elle se souvient des images de violences à la télévision, et surtout de ce climat pesant et mortifère. Si elle avait du retard, ses parents s’inquiétaient systématiquement. Les attentats étaient quotidiens, entre cartels, paramilitaires et guérilla.
Tout le monde était visé, les casernes de pompiers comme les policiers. Dans la police, des policiers tuaient leur collègue pour toucher l’argent promis. 600 policiers moururent de cette façon là. Tout était chaos.
Escobar était plus puissant que l’Etat tant l’argent coulait à flot. Ceux qui osaient parler étaient tués. Il y aurait à Medellín plus de 500 résidences qui lui appartenaient. Le tour vous en fera découvrir certaines, en ruine ou en très bon état, mais vides. Étrangement la municipalité n’en fait rien depuis sa mort, une hérésie !
En 1989, il fut classé par le magazine Forbes comme le 7ème homme le plus riche au monde avec une fortune estimée à 25 milliards de dollars ! Le cartel de Medellín contrôlait alors 80% du commerce mondiale de cocaïne. Le retour sur investissement était égal à 20 000% ! Un des comptables du patron a déclaré que le cartel perdait 10% des dollars stockés dans les entrepôts à cause des rats qui grignotaient les billets.
Un temps en prison suite à un accord avec l’Etat colombien pour éviter son extradition aux Etats-Unis, il continua à diriger ses affaires à partir de la suite luxueuse de sa prison.
Lorsqu’il tomba, les Colombiens firent la fête.
La chute de Pablo Escobar
Pablo Escobar fut localisé dans une maison simple d’un quartier des classes moyennes de la ville. Son dernier et fidèle garde du corps tomba sous les balles durant l’assaut. Son patron suivit en essayant de s’échapper sur le toit.
Nul ne sait bien sûr comment se sont déroulés les derniers instants. Assassinat, légitime défense, Escobar reçut plusieurs balles. (tiens, cela me rappelle Ben Laden…) Souriants, les soldats posèrent autour de son cadavre pour la photo. Nous étions alors en décembre 1993.
La photo ci-dessous est celle de la maison où il passa ses dernières instants. A l’époque, il n’y avait alors qu’un étage.
La chasse à l’homme dura des mois grâce à l’aide des Etats-Unis.
Le tour se termine sur sa tombe, un peu plus classe que les autres. Il avait réussi à prendre ses dispositions avec un paquet de dollars. Vous le voyez, sa tombe est fleurie.
Il faut savoir qu’à son enterrement, il y avait foule. Beaucoup de « pauvres » étaient là pour le pleurer. Incroyable ? Pas tant que cela. Pablo Escobar avait eu l’intelligence d’arroser la population pauvre de la ville en dollars et en construisant notamment des logements. Ces familles-là garderont surtout cet aspect en mémoire et elles lui seront reconnaissantes.
Bien sûr, il ne fit pas cela par altruisme. Non, cela faisait partie du côté mégalomane du personnage. Surtout, le but était ici là politique : s’acheter des voix et des soutiens dans une partie de la population.
L’homme, attaché à la survie et à la sécurité, et à l’argent agit en fonction des billets et de ses intérêts. Quitte à oublier la morale et l’éthique. Tant que l’argent tombe, c’est ce qui compte, on ne vaut pas savoir d’où cela vient, et comment. Une histoire vieille comme le monde.
Il n’y a pas si longtemps, j’ai aperçu, ahuri, le portrait peint d’Escobar sur un taxi. Le tueur avait l’habitude d’arroser généreusement les taxis. C’est l’image qui est restée auprès de certains d’eux. Affligeant, on peut utiliser ce mot. Manque de culture et d’éducation aussi sans doute. Cela me rappelle ces croix gammées utilisées par un entrepreneur indien, il ne comprenait pas où était le problème…
De nos jours, celui qui ne fait à Medellín que ce tour va clairement repartir avec une image négative dans la tête. C’est obligé et cela serait dommage.
Medellín a changé et offre bien d’autres côtés agréables comme j’en parlais dans cet article . Et cela sans parler de ses alentours.
Si vous avez le temps lors de votre passage à Medellín faites ce tour. C’est important de connaître une part important de l’histoire récente du pays, fut-elle négative. Visiter un pays, c’est s’imprégner de sa culture, de sa psychologie, etc. Occulter les côtés négatifs d’une destination, c’est comme porter des lunettes de soleil roses, votre vision n’est que partielle, vous ne voyez pas tout, vous voyez mal.
Pour poursuivre, voici un documentaire sur cette chasse à l’homme:
Pablo Escobar a aussi fait l’objet d’une série télé de qualité, voici la bande annonce de cette série colombienne, en VO bien sûr!
Vous pouvez aussi trouver une version en français, elle est diffusée sur une chaîne de la TNT il me semble, quelqu’un confirme?
Instinct Pratique
- Tarif du tour : 35 000 pesos (15 euros) si vous passez par un hôtel, 30 000 sinon en contactant directement cette agence : Paisaroad.com (3174892629)
- Le tour dure de 10h à 14h en gros.
- Vous ferez une halte déjeuner dans une zone avec des restaurants.
Recherches qui ont permis de trouver cet article:
- chemins de fer amerique centrale
- le sommet de 5000m en Amérique à 70km de Mexico
- palmier des andes arbre qui marche
Consultez la source sur Instinct-voyageur.fr: Je suis sur les traces de Pablo Escobar à Medellin