« Horreur » est un mot fort. Lourd de sens et grave. Même violent. Un mot qu’il ne faut pas écrire à la légère. Une tuerie est une horreur.
Le carnage de Boston était horrible. Des centaines de blessées, trois morts – dont un petit garçon –, des jambes arrachées, du sang partout. Une boucherie, où les clous et les billes ont multiplié les plaies. Cela nous prend à la gorge, c’est une émotion brutale, vive, directe. Celle que suscitent les scènes d’horreur.
Mais il ne faut pas choisir de tels mots sans réfléchir. Les adjectifs extrêmes ne doivent pas être utilisés avec légèreté, pour ajouter une touche exotique, pour leur effet. On joue pourtant régulièrement avec les mots « horreur », « enfer », « tragédie », « crise » ou « drame », parmi d’autres. Au point qu’on oublie leur sens réel.
On ne peut pas tout confondre sans risque. Samedi soir, je suis tombé sur ce clip de télévision déplorant la défaite du Canadien. Son titre: « Vision d’horreur à Montréal. »
Non, ça ne va pas. Une défaite au hockey, même 5 à 1, même quelques matchs avant les séries, même une quatrième en cinq, c’est embêtant, gênant, peut-être même inquiétant pour certains émotifs – mais ce n’est pas une horreur. Pas le plus petit soupçon de cela.
Ça paraît futile? C’est pourtant fondamental : par les mots, nous comprenons le monde. Les déprécier contribue à relativiser le réel. À nous faire perdre nos repères. Déjà que le web nous entraîne si rapidement dans le tourbillon des nouvelles que nos sens ne savent plus quoi en faire. Déjà que l’intrusion publicitaire bouscule chaque jour davantage les contenus importants.
Tout ne peut pas seulement reposer sur les images. Tout n’est pas pareil. Les mots ont un poids. Si on parle d’horreur, il faut pouvoir être horrifié.
Ne plus sentir ce poids des mots est beaucoup plus grave que de ne pas sentir la coupe.
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