La crise? Le Dakota du Nord ne connaît pas. L’exploitation du pétrole de schiste a fait de cet État agricole de 700 000 habitants au cœur des Prairies un eldorado. Son taux de chômage est le plus faible au pays (3,1%) et sa croissance démographique, la plus élevée. En sept ans seulement, le Roughrider State est passé de neuvième à deuxième producteur de pétrole aux États-Unis, derrière le Texas. Les tours de forage, qui poussent comme des épis de maïs dans l’ouest de l’État, pompent environ 450 000 barils par jour, soit 11% de la production nationale. Le Québec peut-il tirer des leçons de ce boom pétrolier? Chose certaine, l’effervescence économique a attiré son attention.
Le gouvernement de Pauline Marois a déjà assuré qu’il permettrait aux pétrolières d’exploiter l’or noir qui git dans le sous-sol québécois. Bien que les études environnementales risquent fort de ne pas être complétées à ce moment, Québec entend néanmoins déposer à l’Assemblée nationale durant la session d’automne un projet de loi visant à encadrer l’exploitation du pétrole et du gaz. S’il est adopté, on saura alors sous quel régime et à quelles conditions le pétrole conventionnel et de schistes de Gaspésie, de l’île d’Anticosti, des Îles-de-la-Madeleine et du golfe du St-Laurent pourra être exploité.
À la différence du Québec, qui n’a jamais pompé d’or noir de son sous-sol, le Dakota du Nord est un habitué des booms pétroliers… et des chutes brutales qui suivent. Le dernier boom en date a pris fin abruptement il y a une trentaine d’années, lorsque les prix du pétrole ont chuté de façon tout aussi brutale.
Le souvenir de ce déclin brutal ne freine manifestement pas l’ardeur des gens du Dakota du Nord, qui recourent cette fois à la fracturation hydraulique pour tirer le pétrole de schistes du sous-sol. L’opposition à cette technique pourtant très controversée dans l’Est du pays — et au Québec — pour les risques environnementaux qu’elle pose, est quasi inexistante dans cet État. Une enquête menée par le média en ligne ProPublica et qui avait révélé que plus de 1000 fuites de pétrole, d’eaux usées et d’autres fluides avaient eu lieu en 2011 n’a presque pas eu d’échos…
Résultat : les coffres de l’État débordent d’un surplus de 3,8 milliards de dollars. Bismark (la capitale) a mis sur pied en 2010 un fonds souverain, le North Dakota Legacy Fund, afin d’amortir cette fois les conséquences du prochain déclin. L’État perçoit 11,5% des revenus d’exploitation en redevance et place 30% de ceux-ci dans le fonds. Aucun sou ne pourra être en retiré avant 2017, après quoi une majorité des deux tiers dans les deux chambres de la législature de l’État sera requise pour pouvoir y piger. Fin mars, cette cagnotte avait gonflé à 931 millions de dollars.
Le gouvernement de Pauline Marois a d’ailleurs déjà annoncé dans son budget déposé en novembre 2012 que les redevances pétrolières (et minières) iraient dans le Fonds des générations pour le remboursement de la dette.
Les comparaisons entre le Québec et le Dakota du Nord ne tiennent toutefois plus la route sur la question fondamentale de la propriété du sol. Alors qu’au Québec — comme dans le reste du Canada —, la ressource naturelle appartient à la province, le propriétaire d’un terrain au Dakota du Nord possède également la ressource qui dort en-dessous. Un fermier peut donc tirer des royautés des revenus engrangés par la pétrolière qui exploite «son» pétrole. Un chercheur cité par l’agence Reuters évalue que l’industrie produit ainsi 2000 millionnaires par année dans cet État de moins d’un million d’habitants. Un pactole qu’aucun propriétaire québécois, en Gaspésie ou ailleurs, ne peut espérer.
Mais en attend que sa propre filière pétrolière entame ses activités, le Québec entend lui aussi tirer sa part de cet eldorado. Absent jusqu’ici des plans de développement du commerce extérieur du gouvernement, le Dakota du Nord y fera son entrée dans le prochaine édition, qui sera dévoilée fin mai, assure Yves Lafortune, Directeur Amérique du Nord et Europe à Export Québec. Une première mission commerciale amènera à la mi-mai des entreprises québécoises à la rencontre des collectivités et entreprises locales dans le but de décrocher des contrats. La Délégation du Québec à Chicago travaille également à développer un service adapté aux entreprises québécoises qui voudront par la suite faire du démarchage dans cet État. «Mettre les entreprises d’ici en contact avec les décideurs là-bas, ça n’a pas de prix. C’est la façon pour aller plus vite et pour ne manquer aucune occasion d’affaires», explique avec enthousiasme M. Lafortune. Pour sa première mission, Export Québec espère qu’au moins 50% des entreprises participantes y décrocheront des contrats.
Québec a identifié trois secteurs d’activité susceptibles d’avoir du succès au Dakota du Nord, dont infrastructures et construction, et fournisseurs spécialisés dans le domaine de l’énergie. Or c’est dans le secteur des technologies «vertes» que les chances de succès sont les meilleures, estime Yves Lafortune. Selon lui, entre 40 et 50 entreprises québécoises œuvrant dans ce domaine «ont les reins assez solides» pour y faire des affaires.
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